On ne va pas se mentir : Andor, à première vue, semblait être un pari risqué. Une série dérivée de Rogue One, centrée sur un personnage secondaire et sans Jedi à l’horizon ? Et pourtant. Dès les premiers épisodes, la série s’impose comme l’un des objets les plus radicaux et audacieux de l’univers Star Wars.
Pas de pouvoirs mystiques ici, pas de prophétie. Juste une société rongée par le fascisme, des gens ordinaires qui tentent de survivre, de comprendre, et parfois, de résister.

Une œuvre profondément politique
Ce que Andor réussit brillamment, c’est de parler du politique sans jamais tomber dans la caricature. La série ne prend pas les spectateur·rices pour des idiots : elle montre les rouages de l’oppression, la surveillance de masse, les implications des riches, l’aliénation des travailleurs, les ravages du capitalisme militarisé.
La prison ? Un cauchemar blanc et aseptisé, où la main d’œuvre est exploitée jusqu’à l’épuisement sans en comprendre la raison. La propagande ? Discrète, mais omniprésente. La peur ? Un outil de pouvoir extrêmement puissant.
Et au milieu de tout ça, une poignée d’individus qui, lentement, douloureusement, choisissent de désobéir, de ne plus se laisser battre silencieusement.

Une galerie de personnages féminins puissants
Dans un univers encore trop souvent dominé par des figures masculines archétypales, Andor brille aussi par ses personnages féminins. Pas des héroïnes badass stéréotypées, non. Des femmes complexes, ambivalentes, prises dans des dilemmes moraux réels.
- Mon Mothma, sénatrice coincée dans une cage dorée, qui joue un jeu dangereux pour tenter de financer la rébellion.
- Vel et Cinta, militantes assez radicales, prêtes à tout pour renverser l’ordre établi.
- Dedra Meero, officier de l’Empire, glaçante et brillante, qui rappelle que la tyrannie peut aussi être portée par des femmes.
- Maarva, figure maternelle et révolutionnaire, dont les mots résonnent encore longtemps après la fin de la série.
- Bix, résistante malgré elle, brisée sans être effacée. Son arc narratif est celui d’une femme prise dans l’engrenage de la terreur, utilisée, torturée, mais jamais réduite au silence. Bix reste debout. Fragile, mais debout.
- Et il ne faut pas oublier Kleya, bras droit de Luthen, glaciale et redoutablement stratégique. Si elle se déplace dans l’ombre, ce n’est jamais en retrait : c’est elle qui orchestre, qui tranche, qui nettoie. Elle incarne cette face froide, mais nécessaire, de la rébellion clandestine.
Pas de cliché, pas de mise en valeur gratuite : Andor donne de la place aux femmes sans les instrumentaliser.

Une révolte intime, lucide, humaine
Ce qui rend Andor si fort, c’est qu’il ne cherche pas à nous vendre une révolte glamour. Il nous montre l’ennui, la peur, les sacrifices, les doutes. La série n’idéalise jamais ses personnages, mais elle les respecte profondément.
Le discours de Luthen, le journal posthume de Nemik, le regard de Kino face à la mer… Chaque mot, chaque silence pèse lourd.
On sent que la rébellion naît d’un terrain aride. Pas d’un élan héroïque, mais d’un refus. Celui de continuer à se taire. À participer. À survivre sans vivre.

Une claque visuelle et narrative
La mise en scène sobre, les dialogues fouillés, la musique discrète mais poignante : tout dans Andor respire la maîtrise. C’est peut-être la série la plus adulte de l’univers Star Wars. La plus exigeante aussi. Et sans doute la plus indispensable.
Parce qu’elle nous rappelle une chose essentielle : l’Empire ne tombe pas d’un coup de sabre. Il tombe quand des gens ordinaires, malgré la peur, choisissent de se lever.
Andor n’est pas une série Star Wars de plus. C’est une œuvre à part entière, une fiction politique, féministe, nécessaire. Un cri sensé dans une galaxie où l’on croyait avoir déjà tout entendu.