Après la révélation Juno et le très sympathique In the Air, on attendait le retour de Jason Reitman avec le plus grand intérêt. Dans Young Adult il change de registre et nous livre une chronique aussi glauque qu’inquiétante d’une Amérique qui a oublié ses rêves. Une fresque assez sombre portée par une Charlize Theron des plus touchantes.

Originaire d’une petite ville de province où elle s’ennuyait à mourir, Mavis Gary s’est installée à Minneapolis où elle est devenue auteur de romans pour ados. Mais lorsqu’elle apprend que son ex-petit copain de lycée est devenu papa, elle décide de revenir sur les lieux de son enfance pour le reconquérir. Tandis que Mavis semble sûre d’elle et de son pouvoir de séduction, la situation ne tourne pas à son avantage. Elle noue alors une relation peu banale avec un ancien camarade de lycée, mal dans sa peau, qui, malgré les apparences, lui ressemble plus qu’il n’y paraît…

Au vue de la bande annonce et du synopsis, on s’attendait à passer un moment sympathique, léger mais avec beaucoup d’intelligence. Un peu comme lorsqu’on avait découvert Juno ou In the Air. L’affiche très girly nous avait laissé penser en ce sens. Pourtant dès les premiers instants, on voit que Jason Reitman a changé son fusil d’épaule. Pas de couleurs vives ici ni de lumières claires, mais l’intérieur calfeutré d’un appartement miteux. Au milieu de ce bordel git Charlize Theron affalée sur un lit. La caméra se ballade et on comprend vite la vie chaotique que mène notre héroïne désabusée. Il ne faut pas longtemps pour se rendre compte qu’on ne rira pas beaucoup dans Young Adult

Young Adult est le portrait de Mavis Gary, une ancienne reine de promo qui se rend compte à quarante ans qu’elle est peut être passée à coté de sa vie… Mavis Gary est toujours aussi belle mais sa capacité à se détruire la rend profondément inquiétante. Mavis Gary boit. Elle boit pour oublier sa minable existence de nègre célibataire déjà has-been. Le jour, elle ère dans son appartement en jogging, la nuit elle sort et cherche une nouvelle proie pour passer le temps… Pas exactement l’idée qu’on se faisait de la reine de promo devenue grande…Addict au Coca Light on sent qu’elle a passé sa vie à enchainer les salades et à fuir les aliments gras. Incapable de voir son sale état, Mavis est une garce. Elle juge tout et tout le monde et se permet de critiquer tout sur son passage. Pourtant derrière cette apparence de femme forte et cruelle se cache une Young Adult à la limite de la crise de nerfs. Petit à petit, la reine de beauté laisse place à une personne dépressive, à la limite de maladie mentale. Une femme qui s’arrache un à un les cheveux (et pas au sens figuré…), qui noie son malheur dans l’alcool et fuit toute relation humaine véritable.

Un portrait aussi dur que cruel d’une femme tombée de son piédestal. Très vite, on ressent beaucoup de compassion pour cette femme qu’on admet comme malade. La peste briseuse de ménage n’est en réalité qu’une façade. Mavis Gary est pitoyable. Son entreprise désespérée ne nous fait jamais rire mais nous tirerait presque les larmes. Surtout lorsque autour d’elle personne ne semble entendre cet appel au secours.

Jason Reitman livre alors un portrait glauque et dépressif d’une Amérique oubliée. Une Amérique loin des cotes paradisiaques ou de New-York, dans laquelle les Quaterbacks sont devenus vendeurs en grande surface. Une Amérique qui a abandonné ses rêves pour faire face à la réalité. Une réalité des plus banales, loin très loin, des clichés en rigueur. Cette ambiance désillusionnée se fera sentir tout le long du film et donnera à Young Adult des allures de drame social.

Young Adult nous raconte l’histoire d’une ado qui a oublié de grandir et qui se réfugie dans le passé à la moindre occasion. Mythomane et alcoolique, il fallait une femme forte pour incarner Mavis. Charlize Theron remplit le contrat haut la main. Elle incarne si bien cet être dévasté, qu’on n’oublie parfois la beauté solaire de l’actrice. Absente des écrans depuis 2007, on est alors très heureux de la retrouver ici. D’une scène à l’autre elle passe avec aisance de la femme fatale à la ratée dépressive. Elle y est aussi inquiétante que fascinante et d’une sincérité aveuglante. Bluffante métamorphose.

Young Adult en décevra plus d’un. En aucun cas il n’est la comédie sympathique qu’il promettait. Et le ton, l’ambiance dérouteront beaucoup de spectateurs. Pourtant ce portrait pessimiste est d’une grande justesse dès le moment où on accepte ce constat. Et Jason Reitman ne tombe jamais dans la lourdeur grâce à des petites touches comiques ici et là et propose une fresque très juste d’une Amérique désillusionnée. La seule mauvaise idée du réalisateur résidera dans le dernier quart d’heure où pour la première fois il va vers la facilité et l’évidence… Dommage.

M.

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